Sommaire
Toggle1. La motivation : différencier le motif de la volonté
Dans le langage courant, quand on parle de motivation, quand on dit qu’on est « motivé », il peut y avoir confusion entre le but poursuivi et l’effort fourni pour le poursuivre. Nous parlerons plus tard de l’effort fourni pour poursuivre nos buts : ce qu’on appelle la volonté (le terme exacte utilisé en pédagogie est volition). Continuons pour l’instant sur les motifs qui nous animent, c’est-à-dire nos buts et nos objectifs. Pour rappel, des buts d’évitements de l’échec caractérisent l’état d’esprit fixe et des buts de recherche de la compétence caractérisent l’état d’esprit de croissance. Voyons maintenant l’impact de la fixation des objectifs sur la performance.
2. La fixation d’objectifs
Depuis le très jeune âge, on se projette dans l’avenir en se fixant des buts. Est-ce que j’arriverai à courir jusqu’au bout de la rue ? Est-ce que j’arriverai à construire une cabane ? …
Les buts sont des paris sur l’avenir. Ils impliquent l’estimation de nos chances de réussite, du coût de l’effort et des conséquences d’un échec. Ces estimations se fondent sur des activités cognitives que nous découvrirons plus loin dans cette formation (inférences bayésiennes, modèles mentaux et heuristiques). De nouvelles informations (nouvelles opportunités, échecs, réussites, découvertes, etc.) peuvent nous amener à revoir nos estimations et à décider de conserver ou d’abandonner nos buts.
La fixation d’objectifs se retrouve dans l’apprentissage : quelle formation je veux suivre, pour atteindre quel niveau, dans quels délais… Quel objectif je me donne pour cette tâche (projet, exercice, cours, etc.)
3. Fixation d’objectifs et performances
Les chercheurs Locke et Lathman ont étudié l’impact des objectifs sur les performances dans le cadre de l’entreprise pendant plus de quarante ans, sur plus de quarante mille personnes. A la question : « Les buts ont-ils un effet sur la performance ? », ils apportent une théorie centrée autour d’un constat : plus un objectif est difficile, plus nous sommes performants.
Quelques nuances viennent modérer cette règle.
L’objectif doit être
- spécifique (« faire de son mieux » ne fonctionne pas)
- considéré comme réalisable
- l’individu doit se fixer lui-même cet objectif
- des étapes intermédiaires d’apprentissage et d’entraînement sont parfois nécessaires, etc. (Locke & Latham, 2006)
Mais pourquoi les individus performants en viennent-ils à se fixer ces objectifs difficiles ? Ils en tirent des bénéfices
- pratiques : gains, réussite sociale
- et psychologiques : fierté, sentiment de compétences et renforcement de l’estime de soi.
Locke et Lathman s’attardent peu sur cette question pourtant fondamentale et leur conclusion ne sont pas satisfaisantes. Nous traitons ce sujet dans le cours “L’état d’esprit de croissance“ où se trouve la réponse à cette question.
4. Comment les objectifs agissent-ils ? L’autorégulation
4.1 Exemple d’autorégulation
Les objectifs donnent des repères qui permettent de s’autoréguler. Vous avez peut-être entendu parler des mécanismes biologiques d’autorégulation comme la glycémie. Lorsque le taux de sucre est trop bas, l’organisme sécrète une hormone (le glucagon) pour libérer du sucre dans le sang. Lorsque le taux de glycémie est trop élevé, l’organisme libère une autre hormone (l’insuline) pour faire chuter le taux de sucre. Dans les deux cas, la glycémie est régulée pour éviter un excès ou un déficit de sucre dans le sang.
Les objectifs jouent donc le rôle de la mesure de l’accomplissement d’une tâche.
- Si mon objectif est atteint, il n’est plus un motif pour poursuivre la tâche.
- Si mon objectif n’est pas atteint, alors il est nécessaire d’engager de nouveaux efforts pour l’atteindre.
- Si l’objectif est inatteignable, s’y investir ne changera rien (Carré & Fenouillet, 2019).
4.2 Les objectifs peuvent se perdre
Un objectif est un futur probable dépendant de notre comportement. Il émane de notre système cognitif et peut être biaisé (par exemple, paraître plus facile à atteindre qu’il ne l’est réellement), oublié, il peut évoluer avec le temps, être automatisé, etc.
En fait chacun de nos comportements suit un objectif, bien que l’ensemble soit souvent automatisé et délégué au Système 1. Le résultat attendu du comportement est l’objectif. Dans l’apprentissage, ça peut être réussir son exercice, suivre un cours jusqu’au bout, se remettre un contenu en tête, etc. Le risque de l’automatisation, c’est la perte de sens : on peut aller en cours et suivre le cours jusqu’à la fin (résultat attendu par le S1) en pensant à autre chose et passer à côté de la finalité : développer ses compétences.
Nous vous conseillons de tenir vos principaux objectifs par écrits afin de pouvoir les clarifier et de maîtriser leur évolution dans le temps.
4.3 Des motifs pour construire son avenir
Un objectif optimal, comme nous l’avons vu, est difficile, spécifique et auto-défini. C’est ce que nous appelons communément un challenge. Un challenge nous permet de réinscrire notre comportement dans une perspective de croissance personnelle et sociale. Pour l’apprentissage, viser un niveau élevé de compétence nous permet de donner une direction et une constance à notre volonté, ce qui est nécessaire à l’acquisition et à la consolidation des compétences.
Les objectifs servent également à l’établissement des stratégies, autrement dit à la détermination du parcours à suivre. Bien que chaque apprentissage soit différent, connaître les stratégies efficaces de fixation d’objectifs, de mémorisation, de concentration et de compréhension semble permettre une meilleure réussite (Hattie, 2012).
N’oubliez jamais que
- Un objectif ou but est :
- un résultat à atteindre
- un pari sur l’avenir
- Chacune de nos actions est dirigée vers un but, bien que souvent inconsciemment fixé par le S1.
- Plus notre objectif est difficile, plus nous sommes performants sous réserve que :
- Notre objectif soit précis
- Nous croyons pouvoir l’atteindre et nous désirons l’atteindre
- Nous identifions les étapes pour l’atteindre
- Ecrire ses principaux objectifs permet de mieux les suivre
Bibliographie
Carré, P., & Fenouillet, F. (2019). Traité de psychologie de la motivation : Théories et pratiques. Dunod.
Hattie, J. (2012). Visible learning for teachers : Maximizing impact on learning. Routledge.
Locke, E. A., & Latham, G. P. (2006). New directions in goal-setting theory. Current directions in psychological science, 15(5), 265–268.